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Se saisir des armes de l’État de droit

La loi DALO a mis les armes du droit à la disposition des personnes en difficulté de logement : elle leur permet, lorsque c’est nécessaire, de saisir un juge pour obtenir de l’État qu’il fasse appliquer leur droit à un logement décent et indépendant.

Force est de constater cependant que la mise en œuvre de la loi rencontre aujourd’hui des vents contraires. La liste des prioritaires DALO en attente de relogement s’allonge dans les territoires les plus tendus : plus de 90 000 ménages reconnus prioritaires restaient à reloger à la fin de l’année dernière. Il est clair que le Gouvernement ne consacre pas les moyens nécessaires à l’application de la loi, qu’il s’agisse de financer la construction de logements sociaux ou de faire appliquer les règles de priorité de leur attribution. Pire, il réduit aujourd’hui les moyens de l’hébergement alors que le nombre de places est déjà insuffisant : près de 6 000 personnes ayant appelé le 115 ont été laissées sans solution le 11 juillet, selon les données de la Fédération des acteurs de la solidarité. Parmi eux, 2000 enfants. Jamais notre pays n’avait connu une situation aussi dramatique.

Le renoncement à consacrer les moyens nécessaires au respect de la loi DALO n’est hélas que le symptôme d’une dérive préoccupante sur la conception même des droits fondamentaux. Non seulement le droit au logement n’est plus mentionné, mais nos dirigeants affirment désormais que les « devoirs passent avant les droits », oubliant au passage les devoirs que la loi DALO a donné à l’État et à ceux qui le dirigent.

La loi Kasbarian « visant à protéger les logements contre l’occupation illicite », promulguée le 27 juillet, est une illustration de cette dérive : elle prévoit jusqu’à 30 000€ d’amende et deux ans de prison ceux qui tentent de survivre en recourant au squat ; elle élargit la notion de domicile à toutes sortes de locaux vacants, ouvrant la voie à des expulsions administratives ; elle accélère la procédure d’expulsion et réduit les possibilités, pour le juge, d’accorder des délais aux locataires en difficulté de paiement ; elle pénalise d’une amende de 7500€ le locataire qui se maintient dans les lieux après jugement d’expulsion.

L’Association DALO s’était associée au recours engagé à l’initiative de la Fondation Abbé Pierre, du DAL et du Syndicat de la Magistrature devant le Conseil constitutionnel. Par une décision décevante, celui-ci a validé l’essentiel des dispositions. Certes il rappelle que le tribunal administratif pourra toujours être saisi, au cas par cas, qu’il s’agisse d’apprécier si les locaux squattés sont vraiment un domicile ou pour faire valoir la situation du squatter. Cependant on attendait du Conseil constitutionnel qu’il prenne en compte le contexte de crise du logement pour apprécier des dispositions qui ne peuvent conduire qu’à accroitre le nombre de personnes à la rue.

Nous devons poursuivre le combat avec les armes que nous donne l’État de droit. Les recours en injonction et les recours en indemnisation engagés par les prioritaires DALO non relogés sont un élément de pression qui permet d’accélérer le relogement des personnes concernées. En faisant constater par le juge la faute de l’État, ils ont également le mérite de réhabiliter la personne victime de l’inaction publique : c’est bien l’État qui manque à ses devoirs, et non elle.

Sans doute faudra-t-il aller plus loin dans la mobilisation des voies juridiques au service du droit au logement. La Cour européenne des droits de l’homme peut être saisie lorsque des décisions de justice ne sont pas appliquées. Pourquoi ne pourrait-on pas également, comme cela se passe en matière de santé, interroger la responsabilité de ceux qui prennent des décisions portant atteinte au droit au logement. Il n’est pas acceptable qu’un préfet envoie la police procéder à une expulsion sans s’être assuré que les personnes concernées puissent accéder à un autre logement. Il n’est pas acceptable que des places d’hébergement soient fermées alors que le 115 n’est pas en capacité de faire face aux besoins. Il n’est pas acceptable qu’un campement soit évacué sans que des places d’hébergement dignes et stables soient proposées. Ces décisions, contraires au droit au logement, sont lourdes de conséquences pour la dignité des personnes, leur santé, leur vie même.

On ne peut pas condamner la personne sans abri qui squatte un logement vide pour assurer sa survie et ne pas interroger la responsabilité de celui qui, en charge de garantir le droit au logement, n’a pas procédé à la réquisition.

Bernard Lacharme
Président de l’Association DALO


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