Le texte adopté en première lecture par le Sénat contient des dispositions qui suscitent l’indignation des associations et des défenseurs des droits humains. Dans une tribune, les membres du « Pacte du pouvoir de vivre » en appellent à un sursaut avant le passage à l’Assemblée nationale : « La plupart des amendements votés au Sénat ne visent qu’à exclure et à rendre encore plus difficile le parcours des personnes immigrées sur le territoire, en les considérant illégitimes par nature. Ainsi, les mêmes responsables politiques qui dénoncent l’absence d’intégration des personnes migrantes sont ceux qui mettent tout en œuvre pour l’empêcher, par une batterie de mesures régressives plus stupéfiantes les unes que les autres. ».
Outre la mise en cause du droit aux soins par la suppression de l’aide médicale d’État, le texte contient deux dispositions qui affectent particulièrement le droit au logement. La première concerne le recours DALO en vue d’obtenir un logement. Alors que celui-ci est déjà subordonné à des conditions de séjour, le texte ajoute l’exigence de cinq ans de résidence en France. La même exigence s’appliquerait à l’ouverture des droits sociaux, et notamment des aides au logement. Autrement dit, un réfugié politique serait prié de rester sans logement pendant cinq ans.
La deuxième concerne l’hébergement d’urgence. Le texte revient sur les dispositions du code de l’action sociale et des familles qui consacrent le droit inconditionnel de toute personne en détresse à accéder à un hébergement d’urgence. Si le Sénat est suivi par l’Assemblée ce droit ne sera plus reconnu aux étrangers faisant l’objet d’une obligation de quitter le territoire c’est à dire, de fait, à la quasi totalité de ceux qui ont été déboutés de leur demande de titre de séjour.
Dans ces conditions il est étonnant de découvrir dans le même texte que les demandeurs de carte de séjour devront signer un contrat d’engagement les enjoignant « au respect des principes de la République, à respecter la liberté personnelle, la liberté d’expression et de conscience, l’égalité entre les femmes et les hommes, la dignité de la personne humaine, la devise et les symboles de la République … »
Le législateur ne peut pas faire respecter par d’autres des principes qu’il aurait lui-même reniés. Nous attendons des députés, à qui le texte des sénateurs a été transmis, de le réécrire au regard du respect de la dignité de la personne humaine, et en gardant constamment en tête ce mot porté fièrement par notre devise républicaine : fraternité.
Bernard Lacharme
Président de l’Association DALO