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La commission de médiation ne peut pas s’affranchir de la loi

Chargée d’examiner les recours DALO et de désigner au préfet les demandeurs qu’elle reconnaît comme prioritaires et devant être relogés en urgence, la commission de médiation exerce sa mission en toute indépendance. Elle ne peut recevoir de consignes de quiconque, y compris du préfet auprès de qui elle est placée, et chacun de ses membres est appelé à se prononcer sans avoir de compte à rendre à l’organisme au titre duquel il a été nommé.

Mais cette indépendance ne signifie pas que la commission de médiation est libre de prendre n’importe quelle décision. Sa mission est encadrée par la loi DALO, et son pouvoir d’appréciation ne peut pas s’exercer à l’encontre des dispositions fixées par le législateur. C’est pourquoi les décisions de la commission de médiation peuvent être contestées devant le juge administratif dans le cadre d’un recours dit « recours pour excès de pouvoir ». Saisi par un demandeur, le juge a le pouvoir d’annuler la décision de la commission de médiation lorsqu’il constate que la commission de médiation a méconnu le cadre réglementaire (erreur de droit) ou la réalité de la situation du demandeur (erreur de fait).

La commission de médiation dont la décision a été annulée doit se prononcer à nouveau et, sauf à se placer dans l’illégalité, elle le fait en prenant en compte le jugement. On attend également de la commission qu’elle intègre les conclusions du juge en vue de l’examen de nouveaux dossiers. Exemple : un demandeur fait un recours DALO au motif de la suroccupation et la commission de médiation, tout en reconnaissant la suroccupation, prononce un rejet au motif que le demandeur est déjà logé par un bailleur social. Ce motif étant illégal, le juge casse la décision et la commission doit réexaminer la demande et, cette fois, l’accepter. Mais elle devra aussi prendre en compte cette décision du juge lorsqu’elle examinera d’autres demandes présentées par des locataires Hlm, et ne pas réitérer une position qui a été jugée contraire à la loi.

De même peut-on attendre que la commission de médiation prenne en compte la jurisprudence établie par les décisions du Conseil d’État. Ces décisions sont peu nombreuses car le nombre de dossiers remontant à cette haute juridiction est faible, mais il s’en dégage une analyse claire de la loi et des limites du pouvoir d’appréciation de la commission. C’est ainsi que la décision 399710 du 13 octobre 2017 a établi que, hormis le cas où le recours est présenté au seul motif du délai anormalement long, la commission de médiation doit, par principe, reconnaître prioritaire un demandeur de logement, de bonne foi, qui satisfait aux conditions réglementaires d’accès au logement social et se trouve dans l’une des situations définies par la loi. On peut également citer la décision 402721 du 19 juillet 2017 dans laquelle le Conseil d’État dit qu’une personne handicapée dont les conditions de logement présentent des risques pour sa santé est éligible au DALO. Cette jurisprudence est tenue à jour, chaque semaine, par l’Association DALO, et elle est accessible à tous sur son site. Nous signalons également les nouvelles décisions dans notre newsletter.

À l’évidence, cette prise en compte de la jurisprudence est inégale d’une commission à l’autre. Il a fallu une décision du Défenseur des droits pour obtenir qu’une commission, après deux décisions successives du tribunal administratif sur le même dossier, accepte enfin la demande qu’elle avait illégalement rejetée. À Paris, la permanence tenue par l’Association DALO avec ses partenaires associatifs constate que des motifs de rejet qui ont été cassés par le tribunal administratif reviennent de façon régulière. Cette situation n’est pas sans susciter un certain agacement parmi les juges, et c’est ainsi que l’on a vu récemment, à plusieurs reprises, le tribunal administratif de Paris ne pas se contenter de demander à la commission de réexaminer le dossier, mais lui faire injonction de prendre une décision favorable. Dans plusieurs cas, le juge a même assorti cette injonction d’une astreinte. [1]

Rappelons que, pour une personne non logée ou mal logée, la procédure du recours amiable est déjà lourde et complexe. Contester une décision de rejet devant le tribunal administratif représente un niveau de complexité supplémentaire et de nouveaux délais avant d’espérer accéder enfin à un logement digne. Il est donc essentiel que les décisions des juges soient respectées et qu’elles soient intégrées par les commissions de médiation. L’Association DALO constate que certaines commissions définissent leur propre « doctrine ». Il n’est certes pas interdit pour une commission, confrontée à un nombre élevé de recours et soucieuse de cohérence, de se donner des points de repère, notamment pour guider le travail du service instructeur. Encore faut-il que la doctrine ne vienne pas contredire la loi et les décisions des juges.


[1TA de Paris, décisions n°1927633 du 6 octobre 2020 et n°2002966 du 20 octobre 2020.


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