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Expulsions locatives : le droit au relogement doit être respecté

Chaque année, à l’approche de la trève hivernale, on voit s’accélérer le rythme des expulsions locatives effectuées avec le concours de la police.

On doit s’interroger sur le fait que, pendant six mois de l’année, il soit possible en France d’expulser des personnes et des familles sans que leur soit proposée une alternative de relogement. Au moins la loi DALO leur a-t-elle ouvert une voie de recours leur permettant de faire valoir leur droit à un relogement. Mais cette voie rencontre des obstacles : en 2015, le nombre de ménages reconnus prioritaires au titre du DALO du fait de la menace d’expulsion ne dépassait pas les 3 000, tandis que le concours de la force publique est accordé pour l’expulsion de 28 000 ménages.

Premier obstacle : l’information nécessaire pour entrer dans les procédures du recours DALO. Certes la notification du jugement doit désormais contenir une information sur les modalités de saisine de la commission de médiation, mais une ligne dans un courrier d’expulsion ne suffit pas : s’agissant de personnes en difficulté, une information individualisée et un accompagnement dans la constitution du dossier doivent être mobilisées.

Deuxième obstacle : certaines commissions de médiation font une lecture restrictive de la loi. Alors que celle-ci vise les personnes « menacées d’expulsion sans relogement », et que son décret d’application précise que la menace doit être considérée comme effective à partir du moment où un jugement d’expulsion a été prononcé, elles rejettent les recours lorsque la procédure de concours de la force publique n’est pas enclenchée. Une telle attitude revient à ne prendre en compte les recours DALO que lorsqu’il est trop tard, et donc à nier le droit des personnes à obtenir un relogement avant leur expulsion. Bien que régulièrement condamnés par la juridiction administrative, ces rejets continuent d’exister.

Troisième obstacle : certaines préfectures accordent le concours de la force publique pour expulser des ménages qui ont été reconnus prioritaires au titre du DALO. Autrement dit un préfet, à qui le DALO fait obligation de reloger, oublie cette obligation et expulse sans avoir préalablement offert une solution de relogement. C’est pour éviter de telles situations anormales que les ministres de l’intérieur et du logement ont, le 26 octobre 2012, adopté une circulaire qui dit très clairement que le préfet doit d’abord mettre en œuvre la décision de la commission de médiation. Or, on voit encore des préfets ne pas appliquer cette circulaire et n’être pas sanctionnés. Le comité de suivi de la loi DALO s’efforce de faire remonter au ministère de telles situations qui, même si elles sont peu nombreuses et concentrées sur un petit nombre de départements, n’en sont pas moins scandaleuses.

Il est vrai que le préfet, lorsqu’il refuse d’accorder le concours de la police pour exécuter un jugement d’expulsion, engage la responsabilité financière de l’État qui doit, et c’est bien normal, indemniser le propriétaire. Mais que fait-on des astreintes et le cas échéant des indemnités que l’État devra verser au ménage prioritaire DALO qui n’est pas relogé, et du coût de l’hébergement social mobilisé dans l’urgence ? Sans parler de leur impact humain, les expulsions réalisées ont un coût bien plus lourd pour les pouvoirs publics que les expulsions évitées.

On entend souvent mettre en opposition le droit au logement et le droit de propriété. En réalité, il n’y a pas opposition mais complémentarité entre un droit de nature privée, qui concerne la relation contractuelle entre un locataire et un propriétaire, et un droit de nature publique, qui confère à l’État une responsabilité à l’égard de chaque citoyen. La loi DALO n’a pas interdit l’expulsion de ménages ne payant pas leur loyer, même lorsqu’ils sont de bonne foi et dans l’incapacité de payer. La loi DALO n’a pas non plus interdit aux propriétaires de reprendre la disposition d’un logement pour le vendre, s’y loger ou loger un de leurs descendants ou ascendants. La loi DALO expose simplement le droit des personnes ainsi privées de logement à en obtenir un autre, adapté à leurs ressources et à leurs besoins, et à ne pas être jetées à la rue.

Notons d’ailleurs que l’interdiction des expulsions entre le 1er novembre et le 31 mars s’applique « à moins que le relogement des intéressés soit assuré dans des conditions suffisantes respectant l’unité et les besoins de la famille. » Autrement dit, ce n’est pas, comme on le dit habituellement par raccourci, une période d’interdiction des expulsions, c’est une période où il est interdit d’expulser sans proposer un relogement adapté. Une telle interdiction, qui répond à une exigence de dignité élémentaire, devrait être étendue à l’ensemble de l’année.


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